Natércia Freire (1920-2004)
Portugaise, poétesse, conteuse, journaliste et femme indépendante... Un ami artiste me l'avait fait connaître en ces jours de 68, quand la jeunesse française repensait le monde et le sens de la vie.
Oh, poesia de andar
suspensa sobre os outeiros!
Poesia de correr
fundida nos ribeiros ...
Oh, Poesia de ti,
que em mim estás a viver!
Oh, Poesia de então,
nos jardins, sob o Inverno,
pés na lama do chão,
e o dia, um dia eterno
de Poesia, a morrer! ...
Poesia dos murmúrios,
dos nevoeiros densos,
dos silêncios sem luz,
dos pecados imensos,
sem gestos, qual a morte,
qual a ausência, sem vida.
Poesia de fechar
os olhos alagados
da Poesia de ti,
dos teus olhos fechados;
Poesia de ser virgem
e casta e indefinida ...
Poesia dos passeios
por entre a claridade,
entre árvores tão esguias
que tocavam os Céus,
e as folhas a cair
de um oiro sem idade ...
Poesia fabulosa,
de uma riqueza enorme ...
Uma Poesia fina,
alada, misteriosa;
Poesia de um passado
que em mim nunca mais dorme!
Poesia perturbada,
Poesia abandonada.
Poesia na prisão,
sufocada, esquecida,
Poesia recalcada,
Poesia maltratada.
Oh, Poesia troçada
da jovem bem-casada
na poesia da vida! ...
Ai, dias sem desígnio!
Ai, noites de mistério!
Poesia de ser virgem
e casta e indefinida! ...
«Passei os pinhais sombrios
as searas mais os rios,
os salgueiros sossegados,
os ventos mais apressados,
as mais líricas montanhas
e as paisagens mais estranhas,
e só fui o que quis ser:
um espaço longo e deserto
num destino de mulher»
Oh, poésie de randonner
suspendue sur les collines !
Poésie de courir
fondue dans les ruisseaux…
Oh, Poésie de toi,
comme en moi tu dois vivre !
Oh, Poésie d'alors,
dans les jardins, sous l'Hiver,
pieds dans la boue du sol,
et du jour, un jour éternel
de Poésie, à en mourir ! …
Poésie des murmures,
des brumes denses,
des silences sans lumière,
des péchés immenses,
sans geste, comme défunte,
comme absente, sans vie.
Poésie de clore
les yeux inondés
de Poésie de toi,
de tes yeux refermés ;
Poésie d'être vierge
et chaste et indéfinie…
Poésie des promenades
dans les faisceaux de clarté,
entre des arbres à ce point élancés
qu'ils touchaient les Cieux,
et de la chute des feuilles
d'un or intemporel…
Poésie fabuleuse,
d'une richesse immense…
Une Poésie délicate,
ailée, mystérieuse ;
Poésie d'un passé
qui en moi ne trouvera jamais plus le repos !
Poésie perturbée,
Poésie abandonnée.
Poésie emprisonnée,
étouffée, oubliée,
Poésie réprimée,
Poésie maltraitée.
Oh, Poésie raillée
de la jeunesse bien-casée
dans la poésie de la vie ! …
Oh, jours sans but !
Oh, nuits de mystère !
Poésie d'être vierge
et chaste et indéfinie ! …
« J'ai passé les pinèdes interlopes
les champs cultivés plus les fleuves,
les saules paisibles,
les vents les plus fougueux,
les plus lyriques montagnes
et les paysages les plus étranges,
et ainsi j'ai été ce que j'ai voulu être :
un espace long et désert
dans un destin de femme »
(Traduction personnelle)