EloiR Nouvelle plume
Poète accompli
Durée d'inscription
Nombre de messages : 43 Age : 28 Localisation : Paris Date d'inscription : 22/12/2012
| Sujet: Berlin. Ou toi. Ven 3 Jan 2014 - 19:10 | |
| Berlin. Ou toi. Un jour tu me rappelleras à ces chemins tracés très tard dans la neige et l’alcool. Tu poseras sur ma lèvre le passé bouillant, les ruines épaisses étendues déjà dans les fracas du métro. Et quelles plaies alors je ne saurai rouvrir ? Quand tu prieras, de là-bas, le soleil déchiré, et d’ici ton cœur. Ton cœur noyé dans la peinture et la lumière. Quand tu feras à ce jour écorché par le temps, tes génuflexions pitoyables. Le ciel il y a longtemps a recraché de ses veines cette ville abattue. Un jour tu me rappelleras à ce béton hurlant sous mes doigts pour la première fois. Et je reviendrai de ton pouls, tardif, pour danser dessus les pavés de sang. Pour chanter à nouveau sous l’ombre des étoiles. Être maladroit partout dans le passé. Je quitterai ton chanté, gravé dans le sable et les larmes, et j’irai retrouver le rire dur de ce voyage. Tu avais une voix immense pour promettre l’infini et m’y laisser trembler mes doigts. Comme si tu avais su tromper tous les bruits, et porter à ta bouche en même temps mort et naissance. Tu as pris tous ces gestes, la couleur et le temps, la larme et la bougie tiède, tu en as fait une jungle étrange, et j’ai voulu longtemps la fouiller, chercher tout autour de toi ces incendies tropicaux, cet alphabet brûlant et fertile aux couleurs inventées. Je m’y suis perdu dans ta maladie sensible, oubliée de ton langage très bien peigné, piégé dans un refrain que tu ne savais plus tout à fait comme avant. J’y ai retrouvé, moi, les os broyés par la guerre et les mers toujours recommencées. Cette peau furieuse dans laquelle se cachaient les angoisses et la fièvre des enfants, le vent captif et l’agonie des rochers. J’ai fouillé les paroles infâmes de ce corps perdu, j’y ai creusé jusque dans la poitrine du monde, et c’est ton pouls fier, sec et définitif, que j’y ai découvert. Désormais que j’ai vu tes yeux de panique, je sais que je vais fuir Toi et tes songes étranges. C’est ce matin familier, plein de périls et de mauvaises saisons que je vais retrouver la pluie glacée des mémoires. Sous un ciel déserté par l’infini, frappé par des gestes ratés. Je m’en vais revoir les brûlures fatiguées de Berlin. Et son rire. Son rire fertile, énorme et acharné. | |
|
Roger Massé Modérateur
Poète émérite
Nombre de sujets
Meilleur rédacteur
Rédacteur ayant posé plus de 1000 messages
Poète accompli
Durée d'inscription
Nombre de messages : 3073 Age : 92 Localisation : Nantes Date d'inscription : 07/08/2006
| Sujet: Re: Berlin. Ou toi. Dim 5 Jan 2014 - 10:06 | |
| Je trouve ton texte plein de belles images poétiques qui auraient, à mon avis, gagnées à être présentées sous une autre forme. Bravo en tout cas!
Roger. Textes protégés par © Copyright N° 79Z516A Roger MASSÉ | |
|