Panem et circenses*

Pénètrent sur le gazon sanctifié,
Les héros en shorts et maillots bariolés.
L’officiant élève en eucharistie
La balle abandonnée au Peuple en furie.
Siffle l’arbitre et le Public
En repons siffle, fanatique
Celui qui shoote et envoie la balle
Qui frôle le goal qui s’affale
Dans l’herbe en défenseur averti.

Au salon se répand sur le tapis,
Avec les miettes des chips, la bière.

Et trottinent les garçons pas bien fiers
Après la balle qui roule, roule…
Et s’élèvent les huées de la foule.

Et même s’ils préfèrent le luxe et les sous,
A chacun qu’on leur donne un ballon.
Avec le pied ainsi feront, feront
Les petits pantins… mais par pitié !
Qu’on me foote la paix.
Du foot je m’en fous.

Les adeptes applaudissent en grappes.
Autour du terrain, du talon ils frappent.
Et sur le nez des voisins ils cognent.
Du match nul, ils se mettent en rogne.

A l’heure des copains et de l’apéro,
On marque encore zéro à zéro.

Les gradins craquent de peines
D’enthousiasme et aussi de haine.

Il n’y aura pas même coup franc ce soir.
Les héros retournent au vestiaire sans gloire.
Les supporters rangent leurs oripeaux,
Les cornes de brumes et même les drapeaux.
Mais demain ils vibreront au stade
Et hurleront encore à s’en rendre malade.

* Juvénal « du pain et des jeux » à Rome distribués gratuitement au peuple pour mieux le museler.