Lunae Querela

Dans le ciel elle s'est levée
Parmi les ombres oppressantes,
Lumineuse sphère enchantée ;
Sur sa trajectoire voutée,
La Lune rencontre l'attente.

Tantôt rêveuse, elle repense
Au Soleil qui l'abandonna,
Causant le nocturne silence
De cette femme d'inocence ;
Ce soir sa peine résonna :

"Quod homines fuit pater ? (qui des hommes fut le père ?)
Qui loua de ce charlatant
Les rayons trompeurs que la terre
Acceuille en son sein ? Le vulgaire
Astre du jour vit en trompant ;

"Mes sœurs, les étoiles célestes,
A son traître charme ont cédé !
Et moi, badouée, de ces restes
D'un ancien festin, suis le zeste
Amer d'une erreur délaissée."

A ces mots, des larmes coulèrent
Des regrets d'un amour déçu,
Usurpé, détruit. La colère
Du désespoir tua le père
De ses amours ; son cœur mourut.

"Quelle est cette capricieuse
Envie de partir pour de bon ?
De quitter ces femmes heureuses
Qui, inocentes et rieuses,
Ne voient leur fin à l'horizon ?

"Ce qui me ronge les tuera.
Dans les nuages le rivage
Je leure celui qui cessa
De poser ses yeux sur cela
Qui nous unit dans le naufrage."

Sur ces paroles ambiguës
Elle déchut de son orbite.
Le firmament de noir vêtu,
Endeuillé du chant qui s'est tu,
Prépare son macabre rite.