LE RETOUR DE GEPPO
Geppo !!! Te voici de retour mon vilain Croquant !!! Six long mois que tu es parti, tu m’a manqué diablotin, prends place ! Chloé un pichet de nostre meilleur vin de Toscane te pries-je ! As-tu faim, Geppo ?
Affamé Méphi, mon gargamelle engloutirait un rost entier !!!
Chloé, une copieuse collation pour nostre Geppo, de grâce ?!
Alors mon Gueux , tes missives furent bien rares, n'est-il point ?
Nenni Méphi, chaque mois un courrier j'envoyais, mais vous savez que les routes ne sont point sûres de nos jours, les postaux se font détrousser par coupes jarrets autres de grands chemins caïmans. Quand est-ce que le Roi chargera les sergents et prévosts de pacifier nos villes , campagnes et pendre les faquins ?
Oui da Geppo, le fait est, les choses en l'espèce de mal en pis vont ! Trèves de stériles babillages Geppo, qu’en est-il de tes Amours, furent-ils fructueux ?
Certes et bien au-delà ! Ces Italiennes Méphi, telles forteresses que le bon roi Henry le quatrième " paix à son repos", eut tant de peine à assiéger. « Long est le siège, payante est la peine, » disait-il, car en couche les Romaines sont comme le lac de Pandémonium, leurs flammes vous lèchant à damner un diable !!! Hahahah Méphi, vous en eustes, perdu vostre latin !!!
Geppo, mon Frère, que je suis aise de te voir gaillard et vaillant. Hors sus mon Ami, durant ces six mois, que t'es t-il advenu, contes moi ? Si je t'ai envoyez chez ce coquin de Luigi Benini avec lequel j'ai fais mes études de médecine en cette bonne ville de Montpellier, point n'est pour que tu culbutes la gueuse et jardines la veuve, fut-elle bien née et joyeuse !
Certes Méphi, mais ne suis-je pas à bonne école en vostre compagnie, ne m'avez-vous former à joindre le fort utile à l'agréable ?
Tresve d'insolence Geppo, qu'est-ce à dire, ainsi suis-je donc selon toi, un trousseur de garces ?
Non point mon Méphi, artiste vous estes, vous respectez les Dames comme la Terre. aux unes comme à l'autre, point ne faites outrages. J'ai souvenir vous ouïr me dire il y a bien longtemps, que si l’on voulais que la Terre rende bien , il fallait comme Garce la traiter et, qu'au rebours, si l'on voulait que garce vous aime, la bien jardiner il sied, mais que pour les deux, point trop n'en faut.
Hahaha, Mon Geppo, la gibecière de ta remembrance est pleine de mes maximes, je t'en sais gré. Hors sus, contes moi tes forfaits et autres méfaits Vilain trousse chemise !
Ainsi Méphi, lors de mon départ, tout se passa sans embusches jusqu'à la frontière des terres du Duc de Savoie ce chattemite. Le cuideriez-vous, ses sergent quérirent de moi un péage pour me rendre en Italie le passage étant obligé. J'eux beau plastronner que j'étais le secrétaire, écuyer et homme de confiance, du Duc de Pandémonium, rien n'y fit, ils noulurent rien entendre, et diable sait si tympanisé je l'es ai ! Ils me soulagèrent de vingt écus les fourbes ! J'en suis encore tout ire à vous le conter céans....
Ha donc Geppo, les sergents de ce vieillard de Duc de Savoie ont soulagé de 20 écus ta boulgette de cuir ? Hahaha, j'eus voulu voir ta trogne avare comme tu es.
Point ne vous moquez Méphi, hors sus que les sergents sont d'officiels gens d'armes, il n'empêche que se sont de fieffés coquin doublés de coupes bourses.
Tout comme l'église sa dîme, les Seigneurs la gabelle et le Roi sa taille, les fonctionnaires de tout poils n'ont guère le choix, ils se payent sur la beste. Leurs soldes ne leur sont versées qu'avec parcimonie, quand elles le sont !
20 écus ?! Et ce pour deux mules, quatre chevaux, deux Suisses, un page et moi-même ! Foutre de foutre ! Mais pour cette somme, j'entretiendrais grand train durant une paire d’années !
Certes Geppo, mais plaie de pécune n'est guère mortelle, fais en ton deuil !
Ci fait Méphi, mais le gargamel m'en dol encore céans. Hors donc, après avoir graissé ces foutriquets avinés, ne pûmes chemin continuer en direction du Massif dit de la Chartreuse, comptant faire halte en cette bonne ville de Chambéry. Nous menâmes bon train durant tout le jour. Le soleil de juin nous permit de progresser jusqu'à fort tard en soirée. et il nous fut aisé de trouver avant vespres, pension tant pour hommes que chevaux et mules auprès d'une veuve accorte au parpal copieux sans parler de la croupe.
Geppo !!! T'ai-je formé d'ainsi causer des Dames ?
1 milliasse de pardons Méphi, mais la garce, sans offense aucune envers nos mères, était le teston presque nu et le vertugadin invitant à autre que menuet. Vous même la voyant, l'auriez jugez telle une agace pisette.
Bigre Geppo ! Et d’où sorts tu ce terme de rustre ? « agace pissette » , tudieu qu’il est joliment imagé ! Je te le vole céans et sans ambages. Hahaha, « agace pissette », ton trait me plait. Ainsi donc la Garce aurait diable damné telle une agace pissette ?
Pire encore Méphi. Mais qui s'en plaindrait ? Assurément pas moi ! L'accueil fut jovial, nous pûmes mettre montures en écurie, notre page se chargeant de bestes soignées, les Suisses que vous m'aviez en escorte donné, purent en souillarde se restaurer avec le domestique du lieu, disposer de la grange pour s'y reposer et veiller à tour de rôle à nos sûretés. Quand à votre serviteur, la belle des lieux me fit servir viandes, vins et autres amuses gueule par des garcelettes aussi dépoitraillées que l'Alberguière, laquelle vint en ma compagnie me manger des yeux et me servir au regard ses deux charnures dévergognés.
Es-tu certain Geppo de n'estre point entré en bordeau ?
Nenni, nenni Méphi ! La veuve à ce qu'elle me confia, se trouva esseulée depuis que son ivrogne de mari rentra fin saoul un soir de janvier et tomba de mule en la rivière Isère. Noyé ou gélé, nul ne sut, mais on le retrouva matine le lendemain, aussi raide que brenne de lansquenet. Aussi, la garce cramante, point d'homme en sa couche depuis une paire d'années ne vit. Vous rendez- vous compte Méphi, la belle n'affichait pas trente ans. Un gâchis Méphi, un réel gâchis ! Qu'auriez vous fait à ma place ?
Geppo, de grâce, n'inverses pas les rôles. Veux-tu ?
Je fis donc ce qu'il est seyant de faire pour un gentilhomme tel vous me fîtes, lorsque vous obtîntes du bon roi Henry le quatrième, de m'anoblir en faisant de moi un écuyer.
Qu’est-ce à dire Geppo ?
Ne faites point le sot Méphi ! N'est il pas de bon ton de réchauffer en sa couche une veuve chagrinée, se desséchant tel viandes boucanées au faîte de ses grâces.
Certes chattemite Geppo, mais le boucan point n’avait fait son œuvre encore ?
Certes, puisque coqueliqué toute la nuit nous avons ! Méphi, Méphi, je ne saurais dire tant cette nuit fut courte et enivrante. Je sais le pourquoi de cette notoriété des ramoneurs savoyards. Les femmes de ce pays, telles âtres de chaumières et chalets de montagne, sont crépitantes et tirante comme nulles en ce beau pays de France.
Fichtre Geppo, et tu n’as que peu voyagé pour en juger pouvoir !
Nul doute Méphi, mais pour tout vous avouer, à voir le chef échevelé de mes Suisses aux aurores, il y a fort à gager que le domestique femelle de la masure n'a pas fait que bassiner leurs couches. Quant Gilles mon page, je ne parierais guère un écu sur le pucelage du béjaune, car quand je lui ai mandé si la nuit lui fut reposante, il rougit tel un dindon en rut.
Hahaha, mes gueux, ainsi vostre première nuit fut occuper à jardiner la belle ? Hors sus mon Geppo, mais attends de te rendre en pays d'Oc et plus particulièrement en cette bonne ville de Montpellier pour juger des fougues savoyardes. Celles des garces Occitanes n'ont rien à leur envier.
Point n’en désespère Méphi, cuidez le ! Nous quittâmes donc Chambéry aux matines du 11 juin de l'année de grâce 1629. Il va sans dire que la Belle Sylvette, ainsi se nommait nostre alberguière, et son domestique, était larmoyant de nous voir les quitter. Vous avouerais-je que le coeur me dolait tant mon hôtesse était aimable et attachante. Mais qui pouvions-nous Méphi, il nous fallait nostre chemin continuer ?!
Je t'entends bien Geppo, on ne peut partager la litière d'une belle, sans y laisser un peu de son coeur. Dieu sait si tu n'en manque pas , je te juge diable droit.
Merci, Méphi. ! Je continues donc ma narration. Nostre destination étant comme vous le savez l'Italie, nous décidâmes de descendre par Grenoble et la bonne ville de Briançon via le col du Lautaret, les villes frontalières Italienne de Susa et Bardoncchia étant tenues par Les Habsbourgs d'Espagne cherchant à faire jonction avec yceux d'Autriche. Cette route point donc n'était possible. Je vous passe les détail des trois jours qui nous mîmes pour atteindre la ville de Grenoble dans laquelle nous fîmes halte deux jours, le temps pour nous de faire provisions de bouche, le chemin et l'ascension du col étant long et périlleux pour rejoindre Briançon, sans omettre, que les bourgs traversés en Oisans ne disposent d'aucun commerce dignes de ce nom pour nous achalander en cas de besoin. De Grenoble, il n'y a rien à en dire, si ce n'est que la ville ne me sied pas. Située dans une vallée encaissée, entourée de montagnes tristes et sans âme, l'impression d'oppression que j’y ressenti me mis mal à l'aise, au point que nous fûmes fort aise de la quitter mes compagnons et moi-même.
Amusant Geppo que tu ai ressenti cette sensation en l'enceinte de cette ville. J'ai moi-même eu cette sensation lorsque qu'avec mon compagnon de médecine Luigi Benini, nous y fîmes halte il y a vingt ans pour, tout comme toi, nous rendre en Italie. Ainsi, rien n'a donc changé en cette cité ?
Il semble que non mon Méphi !
Sylvette ? Sers nous du vin te pries-je ! Continues Geppo...
Ainsi donc, le 17 juin à potron minet, nous nous mîmes en route avec armes et bagues en direction de Visiles distante de 10 lieux que nous atteignîmes à la nuit tombante. Nous dûmes bivouaquer à la belle étoile, le bourg étant doté au plus, de trente âmes dont vingt droles et drolesses plus misérables qu’il est permit d’y songer.
Gilles mon page, tel le poltron qu’il est, ne cessa de trembler tant la peur de nous faire détrousser par les brigands du Massif de l’Oisans dont l’Echevin de Grenoble nous avait parlé le tenait. Il finit par m’irriter à tel point, que je fus contraint de lui mettre ma botte de par le cul. Nos deux Suisses Karl et Choux-fleurs, ainsi surnommé à cause des pavillons auriculaires hors du commun qui encadraient sa trogne, pourvoiraient à nos sûretés comme il convient à des professionnels du braquemard et du pistol. Ayant suivi en vostre compagnie les campagnes du Vert-Galant durant la Grande Fronde menée contre les Guises en son temps, ma fiance à leur égard était sans borne. Il vous faut Méphi, engranger en votre remembrance un détail d’importance. En effet, sur les quatre chevaux dont nous disposions, trois étaient hongres. Le quatrième, ma Jument répondant au doux nom de Labyrinthe pour cause de caractère tortueux, ne trouva rien de mieux de faire ses chaleurs en ce jour. Ainsi me direz-vous, quel importance puisque les hongres n’étaient pas en mesure d’honorer la chaude, ni la croupe lui mignonner. Ce à quoi, je vous répondrais certes, mais vous savez que femelle en chaleur, est nerveuse, imprévisible et donc intenable. Je pestais donc de ce fâcheux, que ma belle jument ne manquerait pas, en nous gâchant la nuit de ses hennissements et autres piaffes qui accompagnent en général ce genre périodes. |