L'Inondation de Franck Genneteau inspire Maufran

Inondation

Je me suis éveillée et sortie de mon lit
Je découvre alentour d'étranges paysages.
Je serpentais gaiement entre les paturages
Mais on dit aujourd'hui que je fais des ravages,
On me traite en intruse, on pleure, on me maudit.

Je coule maintenant entre les toits pointus
Que je voyais au loin de ma rive tranquille.
J'ai noyé les courtils, les rues, toute la ville.
Quand le ciel y pourvoit, je deviens indocile
Et j'emmène avec moi monceaux de détritus.

Quelle idée a-t-il eu de mettre à mes abords
Ses routes, ses maisons, bref, tout ce qu'il possède
L'homme, cet être imbu de puissance et qui plaide
Contre moi quand ailleurs je lui offre mon aide
Pour naviguer, pêcher et flâner sur mes bords.

Voyez comme il panique: le flot s'est répandu:
"Il a noyé mes murs, ma cave, mon garage,
J'erre sur un radeau, victime d'un nauffrage,
Celui de ma maison changée en marécage.
Que vais-je devenir, mon Dieu, j'ai tout perdu".

Et moi, pauvre rivière, il n'en fait aucun cas!
Ma course est entravée et ma belle eau souillée
Par des sacs en nylon, de la viande avariée,
Des déchets incongrus: tapis, livres, poupées,
Cadavres d'animaux, excréments, papiers gras...!

Jadis, mes flux étaient pure bénédiction,
Les hommes m'adoraient, ils bénissaient mes crues,
Et dans mes alluvions ils passaient leurs charrues.
Par leur faute, aujourd'hui, quand j'inonde leurs rues
C'est une catastrophe, une abomination.

Voyez cette peinture, admirez ce tableau,
Contemplez le reflet des maisons qui se mirent:
Sent-on le désarroi des âmes qui soupirent
Des enfants qui se noient, des bateaux qui chavirent
Ou plutôt la douceur d'un couple sur mes eaux?

Les maisons, les panneaux, tout tient encor' debout!
Voit-on ici le gris lugubre et monotone,
Ou du rouge, du bleu, du vert, du blanc, du jaune?
Y'a-t-il dans ce décor un rendu qui détonne?
Je trouve que ce peintre est génial, a du goût.

Je pense qu'il saurait peindre un autre tableau:
"après l'inondation": des gens pleins de courage
Bottes et torses nus, nettoyant mon outrage,
Des femmes, des enfants pour aider à l'ouvrage,
Les couleurs, la magie au bout de son pinceau.

Méditez sur la toile et savourez l'artiste
Qui noie adroitemnet sous un flot de couleurs
Le découragement qui source au fond des coeurs,
Atmosphère de paix qui prépare à l'ardeur.
Y'a-t-il devant vos yeux quelque chose de triste?

Très bel hommage que tu rends à ton peintre favorit .

Bien! je m'aperçois que je me suis trompé en écrivant le titre du sujet: il s'agit bien sûr du "tableau de Franck Genneteau" qui fait l'objet d'un sujet pour écrire un poéme. Qui peut rectifier?

C'est une très belle idée d'avoir tout simplement fait parler le fleuve qui quitte son lit.
Un très beau poème.
Le sonnet que je suis en train de terminer va faire bien pale figure...


:!Bravo!:

Bonjour Maufran,

J'ai bien aimé ce ton de rivière révoltée dans ton poême, et il ne m'a pas semblé triste...enfin, pas seulement triste, à moi non plus ce tableau.

oui, la rivière vit, elle nous interpelle...
Depuis 12 ans je suis auprès d'une autre "eau" l'océan, et lorsque les flots se déchainent dans la tempête, la dimension humaine est encore plus relative !!!
petit grain de poussière que nous sommes face à la force des éléments de Dame Nature !!!
beau poème ma foi... merci
Danielle