MEDOR !

MEDOR !




Si tu savais la longueur des hivers, la solitude glacée de mon existence; Je cueille

des fleurs de givre aux fenêtres du jour qui ne sait plus aller: la torpeur m'étreint dans l'agonie des heures sans fin. Te rends -tu compte de la force qu'il faut pour affronter le vide. Si tu savais tout ce que j'imagine pour donner le change à mon ennui mortel; par exemple, je m'invente un ami; au pire, c'est un chien, même pas le mien. Mais, qu'importe, s'il comprend ce que je ne dirai pas dans ces longs silences, où seuls les regards échangent l'impensable. D'ailleurs, je pourrais l'appeler Médor, vu que je ne dors plus;.Et même le regarder dormir.

Si tu savais la solitude dans mon squatte à tous vents; si tu l'entendais, ça te ferait frémir: c'est un courant d'air qui se faufile partout, jusque sous mes loques; Quelque chose me fait la peau: j'ai l'âme en perdition. Comment en suis-je arrivé là, tellement bas ? Le but est atteint: on ne peut pas tomber plus bas. Au début, je me suis relevé car j'avais ma dignité. Peu à peu, j'ai choisi l'abandon : à l'évidence ma cause était perdue.

Il faut l'admettre, certains m'ont coupé l'envie d'être seulement un homme; un être humain ordinaire dans une vie ordinaire; pas un cheval de course, ni un bourrin inlassable.Un homme, seulement un homme...

D'ailleurs quand on n'a pas les moyens, a-t-on le droit à une belle vie !

Si tu savais la longueur des hivers durant lesquels j'arpente ma liberté. Si tu savais combien , parfois, j'ai honte de ma misère. Alors, désespéré, j'avale mon verre de vinasse. Je trinque, bien sûr. Je cueille des fleurs de givre qu'illumine l'oeil scrutateur de l'astre; c'est un peu comme si le bonheur savait où je niche. Alors je m'adresse à l'absence comme à une respiration haletante:«Sage, Médor ! Chut, fais le mort !» Et nous nous endormons...




Pierre WATTEBLED- le 28 décembre 2008

Dort bien Médor !
Très bel écrit Pierre.
C'est bien de penser à eux.
J'ai vu un documentaire sur ces nouveaux pauvres la semaine dernière.
Ils ont le RMI et doivent se battre pour survivre...
Aux portes de Paris, bien cachés... Dans la forêt de Vincennes...
Dans des cabanes faites de cartons et de films plastique.
J'étais tétanisé, la larme à l'oeil devant l'écran de verre.
Quel siècle nous commençons !...

un texte qui fait froid dans le dos, un texte fort et délicat, une pensée pour eux et je me joins à toi pour penser à tous ces pauvres, un texte qui m'émeut je reviendrais, j'aime te lire Pierre ,

Nouria a écrit:

un texte qui fait froid dans le dos, un texte fort et délicat, une pensée pour eux et je me joins à toi pour penser à tous ces pauvres, un texte qui m'émeut je reviendrais, j'aime te lire Pierre ,

C'est sûrement que nous ressentons pareillement: les émotions sont parfaitement lisibles quand on détermine , et la part commune ,et les nuances de chacun suggérées par notre sensibilité propre. Il y a d'abord les actions, peut-être même des réactions, puis cette sensibilité spécifique à l'artiste trop vite catalogué d'expression mièvre. Mais, si vous saviez le nombre de poésies qui semblent mièvres, et quelques unes bien trop blasées?
Je suis trés heureux de vos précisions et d'apprendre que vous n'êtes pas loin de chez nous, a proximité de lac magnique au Sommet du col de Rosenad dans le Beaufortin?

Meilleurs voeux pour 2009. Bises. Pierre WATTEBLED

Bonjour Pierre,ton texte est criant de vérité ,cette misère qui fait face à des richesses insolentes ,nous sommes quelques uns qui essayons d'aider ces miséreux mais hélas le mal prend sa source dans le fonctionnement de notre société et nous avons encore beaucoup à faire pour la changer.
J'ai confiance.
Je te souhaite malgré tout de bonnes fêtes,amicalement.
Jean Claude