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Si toi aussi, tu entends souvent ton cœur parler à ta plume, viens déposer tes escarpins dans l'empreinte de nos pas.
Tu pourras alors alimenter cette rivière afin qu'elle devienne un fleuve prolifique de douceurs où tous, nous venons à notre tour, pour y tremper notre plume féconde.
Et cet affluent de pensées innombrables finit sa course magnifique dans un océan de lumières.
J'aime cet idée de partage.
Elle devrait régir le monde sans aucune faille.
Pour que nous regardions tous dans la même direction.
C'est pour cette raison que nous aimons tant la poésie... Et les poètes !...
Gérard SANDIFORT alias Sandipoete
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 Le Testament

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sandipoete
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Le Testament Empty
MessageSujet: Le Testament   Le Testament EmptySam 1 Mar 2008 - 13:33

Le Testament

I

En l'an de mon trentiesme aage,
Que toutes mes hontes j'euz beues,
Ne du tout fol, ne du tout saige
Non obstant maintes peines eues,
Lesquelles j'ay toutes receues
Soubz la main Thibault d'Aucigny...
S'esvesque il est, signant les rues,
Qu'il soit le mien je le regny.

II

Mon seigneur n'est ne mon evesque,
Soubz luy ne tiens, s'il n'est en friche;
Foy ne luy doy n'ommaige avecque,
Je ne suis son serf ne sa biche.
Peu m'a d'une petite miche
Et de froide eaue tout ung esté;
Large ou estroit, moult me fut chiche:
Tel luy soit Dieu qu'il m'a esté!

III

Et s'aucun me vouloit reprendre
Et dire que je le mauldiz,
Non faiz, se bien me scet comprendre;
En riens de luy je ne mesdiz.
Vecy tout le mal que j'en dis:
S'il m'a esté misericors,
Jhesus, le roy de paradis,
Tel luy soit a l'ame et au corps.

IV

Et s'esté m'a dur ne cruel,
Trop plus que cy je ne raconte,
Je veul que le Dieu eternel
Luy soit dont semblable a ce compte.
Et l'Eglise nous dit et compte
Que prions pour noz annemys;
Je vous diray j'ay tort et honte,
Quoi qu'il m'aist fait, a Dieu remys.

V

Sy prieray pour luy de bon cueur,
Pour l'ame du bon feu Cotart;
Mais quoy! ce sera donc par cueur,
Car de lire je suis fetart.
Priere en feray de picart;
S'il ne le scet, voise l'apprendre,
S'il m'en croit, ains qu'il soit plus tart,
A Douay ou a L'Ysle en Flandre!

VI

Combien, s'oÿr veult que l'on prie
Pour luy, foy que doy mon baptesme,
Obstant qu'a chacun ne le crye,
Il ne fauldra pas a son esme:
Ou psaultier prens, quant suis a mesme,
Qui n'est de beuf ne cordouen,
Le verset escript septiesme
Du psëaulme Deus laudem.

VII

Si prie au benoist filz de Dieu,
Qu'a tous mes besoings je reclame,
Que ma povre priere ait lieu
Vers luy, de qui tiens corps et ame,
Qui m'a preservé de maint blasme
Et franchy de ville puissance.
Loué soit Il, et Nostre Dame,
Et Loÿs, le bon roy de France,

VIII

Auquel doint Dieu l'eur de Jacob
Et de Salmon l'onneur et gloire
– Quant de prouesse, il en a trop,
De force aussi, par m'ame, voire –,
En ce monde cy transsitoire
Tant qu'il a de long ne de lé,
Afin que de lui soit memoire,
Vivre autant que Mathussalé,

IX

Et douze beaux enffans, tous masles,
Veoir de son cher sang royal,
Aussi preux que fut le grant Charles,
Conceuz en ventre nupcïal,
Bons comme fut saint Marcïal.
Ainsi en preigne au feu dauphin!
Je ne luy soubzhaicte autre mal,
Et puis paradis en la fin.

X

Pour ce que foible je me sens
Trop plus de biens que de sancté,
Tant que je suis en mon plain sens,
Sy peu que Dieu m'en a presté,
Car d'autre ne l'ay emprunté,
J'ay ce testament tres estable
Fait, de derreniere voulenté,
Seul pour tout et inrevocable,

XI

Escript l'ay l'an soixante et ung,
Lors que le roy me delivra
De la dure prison de Mehum,
Et que vie me recouvra,
Dont suis, tant que mon cueur vivra,
Tenu vers luy m'usmilier,
Ce que feray jusqu'il mourra:
Bienfait ne se doit oublier.

XII

Or est vray qu'aprés plains et pleurs
Et angoisseux gemissemens,
Aprés tritresses et douleurs,
Labeurs et griefz cheminemens,
Travail mes lubres sentemens,
Esguisez comme une pelocte,
M'ouvrist plus que tous les commens
D'Averroÿs sur Arristote.

XIII

Combien, au plus fort de mes maulx,
En cheminant sans croix ne pille,
Dieu, qui les perlins d'Esmaulx
Conforta, ce dit l'Euvangille,
Me monstra une bonne ville
Et pourveut du don d'esperance:
Combien que pechiez soit ville,
Riens ne het que perseverance.

XIV

Je suis pecheur, je le sçay bien,
Pourtant ne veult pas Dieu ma mort,
Mais convertisse et vive en bien,
Et tout autre que pechié mort.
Combien qu'en pechié soye mort,
Dieu vit, et sa misericorde,
Se conscïence me remort,
Par sa grace pardon m'acorde.

XV

Et, comme le noble Roumant
De la Rose dit et confesse
En son premier commancement
C'on doit jeune cueur en jenuesse,
Quant on le voit viel en viellesse,
Excuser, helas! il dit voir;
Ceulx dont qui me font telle presse
En meureté ne me vouldroient voir.

XVI

Se pour ma mort le bien publicque
D'aucune chose vaulsist mieulx,
A mourir comme ung homme inique
Je me jugasse, ainsi m'est Dieux!
Griefz ne faiz a jeunes ne vieux,
Soie sur piez ou soy en biere:
Les mons ne bougent de leurs lieux
Pour ung povre, n'avant n'arriere.

XVII

Ou temps qu'Alixandre regna,
Ungs homs nommé Dïomedés
Devant lui on lui admena,
Engrillonnné pousses et detz
Comme larron, car il fut des
Escumeurs que voyons courir;
Sy fut mis devant ce cadés
Pour estre jugiez a mourir.

XVIII

L'empereur si l'araisonna:
«Pourquoy es tu laron en mer?»
L'autre responce lui donna:
«Pourquoy laron me faiz clamer?
Pour ce qu'on me voit escumer
En une petïote fuste?
Se comme toy me peusse armer,
Comme toy empereur je feusse.

XIX

Mais que veulx tu! de ma fortune,
Contre qui ne puis bonnement,
Qui si faulcement me fortune,
Me vient tout ce gouvernement.
Excusez moy aucunement
Et saichiez qu'en grant poverté,
Ce mot se dit communement,
Ne gist pas grande loyaulté.»

XX

Quant l'empereur ot remiré
De Dïomedés tout le dit:
«Ta fortune je te mueray
Mauvaise en bonne» , ce lui dist.
Si fist il; onc puis ne mesdit
A personne, mais fut vray homme;
Valere pour vray le bauldit
Qui fut nommé le Grant a Romme

XXI

Se Dieu m'eust donné rencontrer
Ung autre pitieux Alixandre
Qui m'eust fait en bon eur entrer,
Et lors qui m'eust veu condescendre
A mal, estre ars et mis en cendre
Jugié me feusse de ma voys.
Necessité fait gens mesprendre
Et fain saillir le loup du boys.

XXII

Je plains le temps de ma jeunesse,
Ouquel j'ay plus qu'autre gallé
Jusqu'a l'entrée de vieillesse,
Qui son partement m'a cellé:
Il ne s'en est a pié alé
N'a cheval: helas! comment don?
Soudainement s'en est vollé
Et ne m'a laissié quelque don.

XXIII

Allé s'en est, et je demeure,
Povre de sens et de savoir,
Triste, failly, plus noir que meure,
Qui n'ay ne cens, rente n'avoir;
Des miens le mendre, je dy voir,
De me desavouer s'avance,
Oubliant naturel devoir
Par faulte d'un peu de chevance.

XXIV

Si ne crains avoir despendu
Par friander ne par lescher;
Par trop amer n'ay riens vendu
Qu'amis me peussent reprouchier,
Au moins qui leur couste moulte cher;
Je le dy et ne croy mesdire.
De ce je me puis revanchier:
Qui n'a meffait ne le doit dire.

XXV

Bien est verté que j'é aymé
Et aymeroye voulentiers;
Mais triste cueur, ventre affamé
Qui n'est rassasïé au tiers,
M'oste des amoureux sentiers.
Au fort, quelc'um s'en recompence
Qui est ramply sur les chantiers,
Car la dance vient de la pance!

XXVI

Bien sçay, se j'eusse estudïé
Ou temps de ma jeunesse folle
Et a bonnes meurs dedïé,
J'eusse maison et couche molle...
Mais quoy! je fuyoie l'escolle
Comme fait le mauvaiz enffant.
En escripvant ceste parolle,
A peu que le cueur ne me fent.

XXVII

Le dit du Saige trop lui feiz
Favourable, bien en puis mais!
Qui dist: «Esjoïs toy, mon filz,

En ton adolescence» , mes
Ailleurs sert bien d'ung autre mes,
Car «Jeunesse et adolessance
– C'est son parler, ne moins ne mes –
Ne sont qu'abuz et ygnorance».

XXVIII

Mes jours s'en sont alez errant,
Comme, dit Job, d'une touaille
Font les filletz, quant tixerant
En son poing tient ardente paille:
Lors s'il y a nul bout qui saille,

Soudainement il le ravit.
Sy ne crains plus que riens m'assaille,
Car a la mort tout s'assouvit.

XXIV

Ou sont les gracïeux galans
Que je suivoye ou temps jadiz,
Si bien chantans, si bien parlans,
Sy plaisans en faiz et en diz?
Les aucunes sont morts et roidiz,
D'eulx n'est il plus riens maintenant
– Respit aient en paradis,
Et Dieu saulve le remenant!

XXX

Et les autres sont devenuz,
Dieu mercy, grans seigneurs et maistres;
Les autres mendient tous nuz
Et pain ne voient qu'aux fenestres;
Les autres sont entrez en cloistres
De Celestins et de Chartreux,
Bostés, houlséz, com pescheurs d'oestres.
Voyez l'estat divers d'entre'eux.

XXXI

Aux grans maistres Dieu doint bien fere,
Vivans en paix et en requoy;
En eulx il n'y a que reffaire,
Si s'en fait bon taire tout quoy.
Mais aux povres qui n'ont de quoy,
Comme moy, Dieu doint pascïence.
Aux autres ne fault qui ne quoy,
Car assez ont pain et pictence.

XXXII

Bons vins ont, souvent embrochez,
Saulces, brouestz et groz poissons,
Tartes, flans, oefz fritz et pochetz,
Perduz et en toutes façons.
Pas ne ressemblent les maçons
Que servir fault a si grant peine:
Ilz ne veulent nulz eschançons,
De soy verser chacun se paine.

XXXIII

En cest incident me suis mis,
Qui de riens ne sert a mon fait.
Je ne suis juge ne commis
Pour pugnir n'absouldre meffait:
De tous suis le plus imparfait;
Loué soit le doulx Jhesu Crist!
Que par moy leur soit satisffait:
Ce que j'ay escript est escript.

XXXIV

Laissons le moustier ou il est,
Parlons de chose plus plaisante;
Ceste matiere a tous ne plest,
Ennuieuse est et desplaisante.
Povreté, chagrine, doulente,
Tousjours, despiteuse et rebelle,
Dit quelque parolle cuisante;
S'elle n'ose, si le pense elle.

XXXV

Povre je suis de ma jeunesse,
De povre et de peticte extrasse;
Mon pere n'eust oncq grant richesse,
Ne son ayeul, nommé Orrace;
Povreté tous nous suit et trace.
Sur les tumbeaux de mes ancestres,
Les ames desquelz Dieu embrasse,
On n'y voit couronnes ne ceptres.

XXXVI

De povreté me grementant,
Souventeffoiz me dit le cueur:
«Homme, ne te doulouse tant
Et ne demaine tel douleur!
Se tu n'as tant qu'eust Jaques Cueur,
Mieulx vault vivre soubz gros bureau
Povre, qu'avoir esté seigneur
Et pourrir soubz riche tumbeau.»

XXXVII

Qu'avoir esté seigneur... Que dis?
Seigneur, lasse! ne l'est il mais?
Selon les davitiques diz,
Son lieu ne congnoistra jamaiz.
Quant du seurplus, je m'en desmez
Il n'appartient a moy, pecheur;
Aux theologiens le remectz,
Car c'est office de prescheur.

XXXVIII

Si ne suis, bien le considere,
Filz d'ange, portant dyademe
D'estoille ne d'autre sidere.
Mon pere est mort, Dieu en ait l'ame;
Quant est du corps, il gist soubz lame...
J'entens que ma mere mourra,
– Et le scet bien, la povre femme –
Et le filz pas ne demourra.

XXXIX

Je congnois que povres et riches,
Sages et folz, prestres et laiz,
Nobles, villains, larges et chiches,
Petiz et grans, et beaulx et laiz,
Dames à rebrassez collez,
De quelconque condicion,
Protans atours et bourrelez,
Mort saisit sans exception.

XL

Et meure Paris et Helaine,
Quiconques meurt, meurt à douleur
Telle qu'il pert vent et alaine;
Son fiel se creve sur son cuer,
Puis sue, Dieu scet quelle sueur!
Et n'est qui de ses maulx l'alege:
Car enfant n'a, frere ne seur,
Qui lors voulsist estre son plege.

XLI

La mort le fait fremir, pallir,
Le nez courber, les vaines tendre,
Le col enfler, la chair mollir,
Joinctes et nerfs croistre et estendre.
Corps femenin, qui tant est tendre,
Poly, souef, si precieux,
Te fauldra il ces maulx attendre?
Oy, ou tout vif aller es cieulx.

François Villon

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