L'île

L'île (*)

Il contemple sans fin ce cap inaccessible,
Vacuité de l’espoir, intrépide risible.
Combien de marins s’y sont échoués ?
Et combien de sirènes ont tenté d’y chanter ?
Matelot de rivière, corsaire pathétique,
Ton navire prend l’eau, ton rafiot coule à pic.
 
Paradis de feu, tes lèvres et tes yeux
Aiguisent l’oracle de tous ses vœux pieux.
Haruspice maudit, tu te noies dans ton lit,
Noyé de constance, tu bois l’infini
Qu’exhalent en embruns les rêves de ta vie ;
Moussaillon téméraire, ton Eden est maudit.
 
Dans l’onde bienveillante de satin clairsemée,
Dans l’abysse enivrant des senteurs envolées,
Une image se fige et en ton cœur s’érige
L’abandon ou la fuite, méprisable aurige !
Le galop de ton âme t’entraîne, scélérat,
Loin de l’Île aux plaisirs, de ta foi et de toi,
De ce nez plus mutin qu’une horde pirate,
De ces yeux si divins, de ces lèvres écarlates.
Honte à toi impudent, odieux personnage !
Honte à toi audacieux, qui fuit le beau mirage !
De ma bouche d’écume je crache ta vergogne,
Le courroux de mon âme, ô maudite charogne !
 
Neptune dérangé dans son palais marin
Apparut pour comprendre la douleur de l’humain.
Considérant le drame de ce cœur affolé,
La dérive impuissante de l’espoir condamné,
La pitié s’empara du dieu de l’océan
Qui, le trident brandi, allégea le tourment.
La chétive épave de chair mêlée d’âme
Se mua lentement sous l’effet de ce charme
En récif imposant d’albâtre immaculé.
Crevant de son sommet les vagues dissipées,
La blancheur hiératique s’étala tout autour
De l’Île mystérieuse, cette terre d’Amour.
Asile immuable pour les oiseaux marins,
Les frégates, les fous, les drôles de puffins,
Eternel protecteur de ces rivages aimés,
L’innocent transformé put enfin savourer
La paix, cette chimère, entre toutes implorée.
 
Malheur à vous marins, qui oseraient souiller
Le doux cœur de cette Île des hommes adorée !
Car vos vaisseaux impies pourraient bien s’écraser
Sur les rudes remparts du gardien de l’Aimée.
Destination chérie des cœurs méritants,
Réserve pour eux seuls le plaisir des amants !
Jouis donc de ta gloire, de tes reliefs féconds,
Cascades de cheveux, gouffres au regard profond,
La vallée de tes reins appelle la caresse
Du zéphyr ondulant tout confus de tendresse.
Les célestes lueurs de ton âme, ô Exquise,
Eclairent ton Ami dont voici la devise :
« Te protéger ma Douce, de toute flétrissure,
Par l’infini du beau qui pour toujours perdure. »


(*) Pour aider à l'interprétation de ce poème sans doute un peu confus en première lecture, l'île est l'image d'une femme aimée, le marin n'est autre que le poète. Bonne lecture

bravo pour ta poésie prose qui, est un peu longue du talent sans conteste une plume que j'apprécie
amitiés
raymonde

Merci beaucoup pour ce retour encourageant Raymonde !
Effectivement, ce poème est un peu long car j'y ai mis "ma vie". Sans doute le poème le plus ambitieux que je composerai jamais, énormément (trop ?) de références, beaucoup de choses à exprimer, à transcender. Sans aucun doute une forme de thérapie par les mots...
Par contre, un mot m'interpelle dans votre message..."prose"...où ça de la prose dans le poème ?

En tout cas merci pour l'attention accordée à mes mots :-)

le texte poétique me fait penser à de la prose

Ah d'accord je comprends mieux !

Je trouve ton poème superbe, il me fait penser à Léo Ferré ("la mémoire et la mer"). Merci pour le partage !

Amicalement.

Roger.

Merci beaucoup Roger, très honoré que ce poème te plaise !
Amitiés,

Oiseau lyre

Je rejoins Raymonde, pleins de talents et très beau les images employés ...

Mille mercis Florian ! Je suis ravi de ce retour encourageant !